« Dire le Vin » vient de consacrer deux soirées au blanc (entendons par là, le vin blanc, terme générique pour désigner des vins dont la couleur va du jaune très clair à l’orange soutenu, en passant par toutes les nuances possibles du jaune). Le vin jaune désignant un vin bien spécifique que par ailleurs on adore, restons-en au blanc (en attendant une définition officielle du vin orange).
Les deux fois seize dégustateurs se sont échauffés avec un Vin de France 2021, la cuvée « Brain de Folie » du domaine du Mortier. Cet assemblage de sauvignon et de grolleau gris est remarquable de fraîcheur. Cela fait longtemps que nous apprécions les Saint-Nicolas de Bourgueil des frères Boisard. Mais depuis quelques temps, d’autres de leurs cuvées ont élevé leur niveau que ce soit le Bourgueil 2020 « Les Pins », le chenin « Pangramme » ou ce Brain-là. Précisons qu’il n’y a, ni faute d’orthographe, ni faute de saisie au mot « Brain ». Tout simplement les vignes sont plantées à Brain-sur-Allonnes, commune du Maine-et-Loire, jouxtant Saint-Nicolas-de-Bourgueil, commune d’Indre-et-Loire. D’où le jeu de mots.
Le vin suivant est la cuvée « La Sauvageonne » en 2019 de David Humbert dont le domaine a pour nom « La vigne sauvage ». Tout ça se trouve au bord du lac Léman en Haute-Savoie. David Humbert a fait ses classes auprès de Dominique Lucas, autre vigneron des bords du lac ; on en reparlera. La bouteille de la première soirée a dégagé une forte acidité volatile qui a empêché d’apprécier la communion entre le chasselas et le terroir. Fort de cette expérience, la bouteille de la seconde soirée a été rapidement passée en carafe, ce qui a permis d’atténuer la sensation désagréable de la veille. Toujours est-il que le vin n’a pas démérité devant un tartare de harengs fumés sur roesti.
Même si aux dires des dégustateurs un autre vin lui a volé la vedette : un Collioure 2014 du domaine du Traginer. Cet assemblage de grenache blanc, de grenache gris et de malvoisie, à la couleur marquée par l’âge, s’est fait apprécié par sa complexité aromatique, sa rondeur et sa finale élégante. Il a su s’adapter au fumé et au gras du hareng et laisser une bouche fraîche et disponible après absorption.
La transition s’est faite avec un Gewurztraminer, la cuvée « Orange » 2018 de Jean-Marie Bechtold. Comme le nom de la cuvée l’indique, c’est un vin qui a été vinifié comme un rouge, un vin de macération donc. Cela lui confère une structure tannique. Les arômes traditionnels du Gewurz, parfois fatigants, apparaissent ici avec délicatesse et élégance. Un très beau vin, apprécié comme tel par l’ensemble des dégustateurs.
Deux vins, d’abord dégustés pour eux seuls, accompagneront par la suite un dos de cabillaud dans un crumble de chorizo doux.
Le premier est un Sancerre 2018 sur le terroir des « Monts Damnés », de la maison Paul Prieur et fils. Beaucoup de finesse et de minéralité dans ce sauvignon marqué par un sol de marnes kimméridgiennes, tellement marqué par le terroir que certains dégustateurs se sont égarés du côté de Chablis.
Le second est un premier cru de Rully 2019, « La Pucelle », œuvre d’Emmanuel Giboulot. Le nez fait décoller, la bouche fait planer, tout est en légèreté, finesse et élégance.
Quant à l’accord avec le plat, les dégustateurs se divisent en deux camps d’égale importance, sans animosité aucune, car les deux vins jouent chacun une partition en harmonie tant avec le poisson qu’avec le crumble.
Avant d’être testés avec un Appenzeller, deux vins sont dégustés seuls et à l’aveugle, bien entendu. Le premier est un Vin des Allobroges 2017, une IGP du domaine « Les Vignes du Paradis » de Dominique Lucas. Cette cuvée porte le nom de son cépage « Savagnin ». Encore un très beau vin, issu de jeunes vignes, élevé en cuves ovoïdes en béton, qui fera beaucoup parler de lui, par des dégustateurs plus habitués aux savagnins jurassiens qu’aux païens du Valais.
L’autre est un Irouléguy 2017, la cuvée « Grès » de Michel Riouspeyrous du domaine Arretzea. C’est un assemblage de petit et de gros manseng, le petit dominant le gros. C’est un vin précis et droit avec un bel équilibre entre acidité et gras.
Là aussi, les dégustateurs ont du mal à départager les deux vins qui chacun à leur manière se débrouillent excellemment avec l’appenzeller à l’affinage parfait.
Enfin, un Coteaux du Grésivaudan 2016 de Thomas Finot, la cuvée « Verdesse » achève les soirées. La verdesse est un cépage confidentiel, ici planté à un jet de pierre de Grenoble. Cette année-là, il a été récolté en surmaturité, ce qui lui confère une douceur particulière. Il accompagne une tartelette amandine aux poires.